GUILLAUME, JEAN-LUC, LAURENT ET LA JOURNALISTE, au Théâtre du Train Bleu

Jeanne Lazar, auteure et metteure en scène de GUILLAUME, JEAN-LUC, LAURENT ET LA JOURNALISTE, aime la littérature. C’est d’ailleurs la littérature qui l’a amenée vers le théâtre. Et ses textes la font revenir, pour le moment, vers la littérature. Avant Guillaume Dustan ce fut Hervé Guibert, bientôt sans doute Nelly Arcan. Des écrivains que, pour aller vite, on pourrait qualifier de maudits. L’œuvre de Dustan, tant sur papier que sur écran, fait aujourd’hui l’objet d’une redécouverte, au Théâtre du Petit Saint-Martin par exemple, tandis qu’elle était devenue inaudible du vivant de son auteur.

Jeanne Lazar fait partie d’une (jeune) génération qui aborde Dustan munie de ses propres clés de lecture, une génération peut-être plus Dustan-compatible que les précédentes, comme si Dustan avait été en avance sur son temps. Dans sa pièce, elle a l’intelligence d’éviter le piège d’une réhabilitation à tout crin. Il ne s’agit pas de le placer sur un piédestal, mais de lui accorder l’espace d’expression que la télévision, qui l’invitait pour le buzz, lui refusait une fois au plateau. Entre reconstitution et réécriture, la pièce commence avec une émission littéraire, trois écrivains, dont Dustan, et une journaliste, qui annonce fièrement que l’on peut tout y dire. Il n’en est d’abord rien, et resurgit le fantôme du Guillaume Dustan désorienté chez Dechavanne ou Ardisson. Avant qu’il ne se rebelle… Une pièce bien écrite, mesurée et intéressante par son atmosphère de flottement où se tapit la mort. Les oreilles trop chastes s’abstiendront.

7 JUILLET 2019 | PAR WALTER GÉHIN